Le chanvre

Publié par Lila Rousselet le

Nous lançons notre section Apprentissages sur le blogue avec une fibre qui a le vent dans les voiles ces derniers temps :

Le chanvre


Le chanvre est le petit cousin du cannabis. Ces deux plantes ont des origines similaires et proviennent de la même famille (Cannabaceae), mais ont toutefois des propriétés bien différentes.

La différence principale se trouve dans le pourcentage de THC contenu dans le cannabis, soit le composé psychoactif de celui-ci. Si la marijuana contient plus de 20 % de THC, le chanvre, quant à lui, n’en contient pas plus de 0,3 %. On appelle « chanvre » toutes les variétés dont le pourcentage de THC est inférieur à 0,3%. Il faut savoir qu’il existe plus de 2000 variétés de plantes de cannabis dont plus de 90% ne contiennent pas de propriétés euphorisantes.
Cette confusion entretient un certain intérêt économique puisque la culture du chanvre est extrêmement contrôlée.

Un peu d’histoire

Jusqu'au début du XXe siècle, le chanvre pour le textile était très cultivé en Amérique du Nord. Ce sont les lois sur les drogues américaines qui ont banni la culture du chanvre au début du XXe siècle, combiné au Control Substance Act en 1970 mis en place par le Congrès américain.

Historiquement, au Québec, la culture du chanvre textile se faisait à Valleyfield. Toutes les étapes avant le filage se faisaient ici et les fibres étaient ensuite envoyées en Corée pour la filature. On a longtemps cultivé le chanvre le long du fleuve principalement pour les cordages à bateaux.

Aujourd’hui

La législation américaine autorise depuis 2018 la culture de plants de cannabis contenant moins de 0,3 % de THC ce qui a permis la mise en place de projets pilotes dans le domaine. On peut également penser que la légalisation du cannabis au Canada en 2018 a aussi participé au développement de la filière.


J’entends souvent dire que le chanvre ferait un excellent candidat au titre de fibre 100% canadienne. C’est vrai, mais plusieurs obstacles doivent être surmontés.

Le premier, c’est que nous n’avons plus les infrastructures pour la transformation de la plante en fibre prête pour la filature sur notre territoire. Il en est de même aux États-Unis. Ce qu’il faut savoir c’est que la transformation est complexe et comporte plusieurs étapes. Certaines d’entre elles se font encore à la main.
De nos jours, la machinerie nécessaire n’est simplement plus disponible sur le territoire nord-américain, et comme toutes machineries, elle nécessite une main-d’œuvre qualifiée qui demeure introuvable.
Parmi les autres étapes se trouve le dégommage permettant de séparer la fibre de son enveloppe. Si celui-ci peut se faire de façon naturelle, il requiert beaucoup de patience et de temps. C’est la raison pour laquelle aujourd’hui, cette étape se fait de façon chimique en utilisant beaucoup d’eau.
Par ailleurs, l’assemblage avec d’autres fibres telles que le coton est également nécessaire. Aux États-Unis, en 2020, le pourcentage maximum de chanvre que l’on a été capable de filer s’élève à 30%.

Le système de filature existant en Amérique du Nord étant celui du coton, les fils de chanvre sont donc fabriqués à l’aide du même procédé. C'est pourquoi nous qualifions ensuite la fibre de « cotonisée ». Cependant, contrairement au coton qui est une fibre courte, la fibre de chanvre est longue. On diminue donc ses qualités et ses propriétés en la cotonisant.
De plus, le chanvre que l’on fait pousser sur notre territoire n’a pas des tiges assez longues pour la filature des fils du tricot industriel, mais suffisamment pour la fabrication de fils plus grossiers pour des cordages ou pour le tissage.

Si le chanvre est cultivé pour d’autres industries (la construction ou l’agroalimentaire), il faudrait convaincre les agriculteurs de la rentabilité qu’offre la culture du chanvre pour l’industrie textile. Il nécessite une qualité uniforme, un volume nécessaire et une bonne maîtrise des pratiques culturales. Les graines provenant de variétés intéressantes pour cet usage sont également très chères et ne peuvent légalement être replantées d’une année à l’autre (comme c’en est le cas pour beaucoup de graines).

Cela prendrait des investissements colossaux pour monter la filière chanvre en Amérique du Nord qui utiliserait un système plus adapté et permettrait notamment la production de fils plus fins pour le tricot. L’utilisation du chanvre pour l’industrie du textile est encore dérisoire ce qui n’incite pas les entreprises et les investisseurs à investir dans cette filière. Cependant, d’ici 2022, on s’attend à ce que le marché global du chanvre passe de US$4.6 billons à $32 billions (Source).


Certains projets se mettent également en place aux États-Unis pour développer un fil de chanvre selon le procédé viscose. Il s’agirait alors d’un fil artificiel, puisqu'on viendrait dissoudre la cellulose contenue dans la plante pour ensuite créer le fil. Ce procédé est moins complexe que le précédent, mais utilise des agents chimiques qui peuvent être toxiques pour l’homme et l'environnement s’ils ne sont pas utilisés proprement. De plus, le chanvre perdrait de ses propriétés dans le processus.

Aujourd’hui, la majorité des fils et tissus contenant du chanvre proviennent d’Asie. Si le chanvre est une fibre qui figure dans le top 3 des matières les plus écologiques, il est important de noter qu’il provient majoritairement de Chine.


Pourquoi devrait-on continuer à persévérer ?

Parce que la fibre de chanvre possède des propriétés fantastiques, en voici quelques-unes :

  • Résistante à la moisissure
  • Fibre résistante aux UV et aux plis, antistatique, antimicrobienne
  • Bonne isolation
  • Facile d’entretien

Pour les agriculteurs, produire du chanvre demande bien moins d’eau et de pesticides que la culture du coton. De plus, le chanvre offre une alternative très intéressante aux tissus synthétiques pour les vêtements de sport et ouvre ainsi une voie pour s'éloigner des microplastiques et s'orienter vers des systèmes régénératifs. Si le projet présente de gros défis au niveau industriel, ça vaut quand même la peine de regarder ce qui pourrait se faire à l'échelle locale, pour soutenir une chaine d’approvisionnement plus petite.

Si le sujet vous intéresse, je vous invite fortement à lire les articles autour du projet One Acre Exchange.
Basé en Californie, One Acre Exchange est un projet qui supporte le développement de l’agriculture locale et durable du chanvre en soutenant des projets de recherches et des expérimentations.

Montloup est présentement à la recherche d’une alternative nord-américaine intéressante, mais comme tout projet de recherche, cela prend du temps. Alors en attendant, j’ai le plaisir de vous annoncer que nous allons recevoir, en septembre, de nouveaux fils de chanvre et de coton biologiques. Ils proviennent de Chine et sont certifiés OCS (Organic Content Standard). Les tissus suivants seront offerts à la prochaine prévente collaborative en septembre :


Voir les tissus en chanvre pour la prévente collaborative de septembre

 

Pour planifier une production sur mesure (minimum 500m) en septembre, n’hésitez pas à nous écrire !

On vous souhaite un merveilleux été !




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